Sujet 01 : Le Traitement de l’eau

Presque 1 million de personnes meurent chaque année à cause d’une mauvaise qualité d’eau. Il existe pourtant de nombreux procédés permettant de la traiter et c’est ce que nous allons essayer de voir dans ce thème consacré au traitement de l’eau.

Les différents procédés

Qu’est-ce que l’on traite ?

Les matières en suspension sont les éléments ni flottants, ni décantables de l’eau. Elles sont visibles à l’œil nu, c’est elles qui rendent l’eau trouble.
Les virus et bactéries sont plus discrets et peuvent contaminer l’eau selon leurs natures et leur nombre. Ils se développent davantage
dans les eaux stagnantes et chaudes.
Enfin les minéraux et métaux lourds sont les éléments les plus fins que l’on puisse trouver dans l’eau, on les trouve, sauf contamination ponctuelle, principalement dans l’eau souterraine et l’eau de mer.

La filtration

La filtration est le plus simple des traitements. Elle consiste à faire passer l’eau à travers un milieu poreux pour la séparer de ses éléments solides.
Quand on utilise un filtre, on fait attention à la taille de la maille, selon ce que l’on veut enlever, et à son état car à l’usure les pores se bouchent ou pire se dilatent et le filtre n’est plus efficace.

 

Coagulation-floculation-décantation

Le nom vous paraît barbare ? Ce n’est pas si compliqué.
On ajoute à l’eau des sels métalliques pour que les petites particules flottantes puissent s’attacher entre elles, c’est la coagulation. Toutes ces particules forment ensuite des blocs assez lourds pour couler, c’est la floculation. Ces petites particules qui étaient autrefois en suspension sont maintenant assez lourdes pour tomber au fond de l’eau, c’est la décantation.

 

Et les plus petites bactéries ?

Certaines bactéries responsables des problèmes d’hygiène sont trop petites pour être piégées, il faut alors les tuer.
La chloration est souvent utilisée pour éliminer ces bactéries. Ce traitement chimique est rémanent, c’est-à-dire qu’il reste dans l’eau et agit en continu mais il laisse à l’eau un goût particulier.
Des lampes UV peuvent aussi être utilisées pour purifier de manière instantanée et ne pas altérer le goût de l’eau. En revanche, il faudra les utiliser régulièrement et en payer le coût énergétique.

L’osmose inverse

• Dans certains cas, comme dans le traitement de l’eau de mer ou de l’eau saumâtre, il faut se débarrasser de toutes les particules, même les minéraux les plus fins tels que les ions du sel ou les métaux lourds.

• L’osmose inverse (Thème 1 article 4) est alors d’une efficacité remarquable, elle ne laisse rien passer. Tellement remarquable que l’on doit parfois rajouter des composants pour stocker l’eau, on parle alors de post-traitement.

Et dans le pacifique sud ? L’eau est-elle traitée ?
On s’y intéresse la semaine prochaine.

 

Sujet 04 : Le dessalement d’eau de mer

Nous vous avons précédemment parlé des captages d’eau douce conventionnels et ancestraux.
Mais face à la nouvelle crise de l’eau, le dessalement de l’eau de mer, ressource infinie (98% de l’eau sur la planète), a aujourd’hui pris une place non négligeable dans l’approvisionnement en eau sur terre.

 

Pourquoi ?

Le dessalement ne remplace pas les autres manières de capter l’eau douce, mais vient plutôt en complément des solutions conventionnelles de production d’eau potable, lorsqu’elles viennent à faire défaut. Depuis les années 50, plusieurs procédés ont été utilisés : distillation, électrodialyse, osmose inverse. L’osmose inverse s’est imposée face aux autres technologies de dessalement car elle est moins consommatrice d’énergie et donc plus économique.

 

Comment ?

Le procédé d’osmose inverse consiste à, après avoir pompé et pré-traité l’eau de mer, la pousser à une pression comprise entre 20 et 70 bars à travers des membranes hémi-perméables. Le sel est alors piégé dans ces membranes d’un diamètre de l’ordre du millième de micromètre. Il en ressort d’un côté un perméat, eau potable stockée et distribuée et de l’autre côté un concentrat d’eau sursalée rejeté en mer.

 

Où ?

Le dessalement est utilisé dans des contextes faisant face à des déficits hydriques. Cela peut être des déficits structurels comme au moyen orient, où sont apparus ces premières technologies, ou des déficits ponctuels, pour répondre à un besoin saisonnier qui peut être très régulier, comme dans les îles atolls ou l’Australie. Ainsi, lorsqu’il ne pleut pas pendant parfois plus de six mois sur ces îles sans relief et où le pompage dans les fines lentilles d’eau douce souterraine entrainent des intrusions d’eau de mer, le dessalement prend tout son sens.

 

Qui ?

Les municipalités peuvent avoir recours au dessalement pour compléter leur ressource en eau ou pour venir en aide aux communautés les plus reculées en situation de stress hydrique. Les gros consommateurs d’eau tels que les pensions de famille, hôtels, mines utilisent ces techniques quand ils dépassent les consommations habituelles, très faibles dans les îles du pacifique sud. Des projets agricoles existent dans le monde mais peinent encore à s’imposer dans cette région car ils demandent énormément d’eau douce (plus de 70% de la consommation mondiale sert à l’agriculture).

 

Les limites

Deux écueils sont généralement opposés au dessalement :

• Les rejets d’eau sursalée, lorsque reversés sans contrôle ni attention à leur impact, peuvent nuire à la biodiversité marine. Des solutions existent pour en limiter l’impact : bas taux de conversion, dilution, diffusion.

• Si la consommation d’énergie a été divisée par 3 au cour des dix dernières années, elle reste significative et pèse sur les budgets des îles aux coûts électriques élevés. Ici aussi, des solutions existent…

 

Nous nous intéresserons prochainement à cette problématique énergétique…
Mais la semaine prochaine on vous dit comment l’eau est traitée !

 

Sujet 03 : La récupération de l’eau de surface

Cette semaine, nous nous intéressons à la source d’eau historique des populations du pacifique sud !
Ressource qui n’est plus majeure aujourd’hui mais qui est évidente à un européen : vous l’aurez deviné on vous parle de l’eau de surface

Lacs et rivières

 

Comment ?

L’eau de surface est captée dans les lacs ou rivières naturelles avant qu’elle ne s’infiltre dans la terre ou rejoigne la mer.
Cette eau issue des précipitations est stockée dans des retenues collinaires, naturelles ou artificielles.

 

Pourquoi ?

L’eau de surface est présente en abondance dans les îles hautes grâce aux pluies saisonnières de novembre à avril.
Les retenues en altitude permettent de lisser l’usage de cette eau sur l’année via une alimentation des réseaux de distribution d’eau par gravité.
L’énergie générée par ces chutes d’eau permet dans certaines îles de produire de l’électricité.

 

Où ?

Cette eau de surface est absente des atolls, où, en l’absence de relief et sur un sol très perméable, les pluies s’infiltrent immédiatement.
Les grandes îles à haut relief reposent principalement sur cette ressource : tels que Rarotonga (Cook), Viti Levu (Fidji), Tahiti ou les Gambiers (Polynésie Française).

 

Qui ?

Certains particuliers ont la chance d’avoir une source de qualité sur leur terre coutumière et la partage donc avec le voisinage.
Les municipalités s’occupent en général d’installer les infrastructures nécessaires pour capter, traiter (coagulation, sédimentation, filtration –ci-dessous– ou désinfection), stocker et redistribuer les captages d’eau de surface.

 

Les limites

La surface des îles limite la taille des rivières, qui se jettent rapidement dans l’océan, les volumes captés sont ainsi faibles par rapport aux eaux de surface d’un continent. La qualité de ces eaux requiert un traitement parfois conséquent, et la quantité fluctue selon les saisons, jusqu’à parfois se tarir.

 

Et l’eau de mer ? Peut-on la boire ?
Ce sera notre sujet de la semaine prochaine.

 

Sujet 02 : La collecte de l’eau souterraine

Nous continuons notre mini-série sur le thème de l’accès à l’eau dans les îles du Pacifique Sud. Après la collecte de l’eau de pluie, nous abordons aujourd’hui une autre source importante dans les îles : la collecte de l’eau souterraine.

Forages mécaniques et puits manuels

 

Comment ?

Les pluies s’infiltrent dans le sol et constituent une réserve d’eau souterraine.
Les habitants pompent cette eau par des forages mécaniques, diesel ou solaire, ou des puits manuels.

 

Pourquoi ?

Cette eau stockée dans les sous-sols est filtrée par le sol sableux et corallien.
Elle vient compléter l’approvisionnement en eau de pluie lorsque celle-ci ne suffit pas à alimenter les habitations et cultures.

 

Où ?

Dans les îles atolls, elle est appelée lentille d’eau douce. C’est une ressource fragile provenant majoritairement de l’eau de pluie.
Dans les îles hautes, on la nomme nappe phréatique. Elle est souvent présente en quantité plus abondante et de meilleure qualité mais elle doit être pompée plus profondément.

 

Qui ?

Les particuliers disposent souvent de puits individuels peu profonds qu’ils mutualisent, à chaque famille son puits !
Ils remontent l’eau à la main ou avec des pompes de petites capacités. Les communes et agences de l’eau mettent en place des forages plus profonds.
Les capacités de pompage sont alors plus importantes et alimentées par l’énergie solaire ou des groupes diesel.

 

Les limites

Plusieurs facteurs, humains ou climatiques, peuvent endommager cette ressource bien souvent fragile :
1 – L’excès de pompage dans la nappe phréatique et la montée des eaux augmentent la salinité de ces nappes.
2 – La contamination des eaux souterraines par les eaux usées dans des îles où le système d’assainissement est incomplet voire inexistant.
3 – La baisse de la pluviométrie qui empêche le rechargement des nappes.

 

Si ces problèmes surviennent en profondeur, qu’en est-il de l’eau de surface ?
On vous en parle la semaine prochaine !

 

 

Sujet 01 : La collecte de l’eau de pluie

Aujourd’hui nous vous annonçons le lancement de notre mini-série sur le thème de l’accès à l’eau dans les îles du pacifique sud.
Voilà presque 6 mois que nous arpentons cet océan avec plus de 5000 milles nautiques au compteur. Cela nous a permis de récolter bon nombre d’informations sur des sujets variés.
Nous commençons notre série avec les différentes manières de collecter l’eau, et aujourd’hui, la récupération d’eau de pluie sur toiture.

La récupération sur toiture

 

Comment ?

L’eau de pluie vient ruisseler sur les toits souvent en taule. Par gravité, elle continue ensuite son chemin dans des gouttières jusqu’aux cuves de stockage.

 

Pourquoi ?

Ces infrastructures sont simples et très peu coûteuses. Les toits ont une surface suffisante pour capter beaucoup d’eau et sont en hauteur donc pas besoin de pompe, la gravité fait le travail ! L’eau est livrée directement à la maison.

 

Où ?

Très présente dans les îles atolls où elle est de loin la principale source d’eau, on la retrouve cependant dans les îles plus hautes où il pleut davantage.

 

Qui ?

Les particuliers sont incités à gérer leurs ressources en eau individuellement. L’eau non traitée est pour des usages majoritairement non potable. Les municipalités utilisent leurs grandes surfaces de toits pour ensuite redistribuer l’eau potable après traitement.

 

Les limites

L’eau collectée à chaque saison des pluies permet historiquement, et grâce à un usage raisonné, de disposer de cette ressource jusqu’à la saison suivante. Les périodes de sécheresses et les précipitations plus imprévisibles imposent aux communautés d’organiser des sources d’eau complémentaires.

 

… La suite dans notre prochain sujet !

 

 

L’or bleu des Tuamotu

 

Après 4 mois en Polynésie, nous avons mis les voiles vers l’Ouest et des nouveaux Territoires : les îles Cook, Tonga et Fiji !

Notre tour des Tuamotu-Gambier à la voile a été riche en rencontres professionnelles, culturelles et humaines, en compréhension des enjeux liés à l’accès à l’eau dans les atolls.

Si la problématique d’accès à l’eau dans les îles reculées, en particulier les atolls coraliens, est complexe et variée nous avons pu la comprendre d’avantage, dégager quelques constantes et étudier avec les acteurs locaux et régionaux des solutions qui pourraient y répondre.

Petite rétrospective :

 

1- L’isolement, première des contraintes

Carte de la Polynésie Française superposée sur celle de l’Europe continentale

 

La première des contraintes est l’isolement sous toutes ses formes. Etendu sur plus de 1800 kilomètres, l’archipel des Tuamotu est composé de 17 communes, 76 atolls et de 17 000 habitants. Ces îles plates et dispersées dépendent majoritairement des importations pour la plupart des produits alimentaires. Si certaines îles plus proches et mieux connectées, notamment les îles de Tikehau, Rangiroa et Fakarava dans les Tuamotu de l’ouest, sont quasi quotidiennement desservies par le fret aérien et régulièrement par le fret maritime, les îles plus isolées et moins fréquentées, des Tuamotu de l’est et du nord, doivent attendre plusieurs semaines parfois avant d’être desservies par bateau. Beaucoup d’îles même n’ont pas d’aérodrome et dépendent de celui de l’île voisine. Cet isolement est accentué par le développement économique hétérogène de l’archipel. Les atolls touristiques et ceux ou la perliculture, la pêche et le Coprah* sont développés, comme Arutua ou les Gambier, sont relativement mieux connectés et desservis par le transport maritime et aérien.

* culture de la chair de coco pour la production de monoï ou de produits alimentaires

 

Ferme perlière au Gambier

 

Enfin la connexion internet, très développée à l’ouest et beaucoup moins à l’est termine d’accentuer les inégalités de développement du territoire. Ces facteurs d’isolement géographique, économique et connectique accentuent les problématiques de gestion de l’eau dans un territoire en stress hydrique.

L’approvisionnement en bouteille plastique, encore largement utilisé comme source principale d’eau potable dans beaucoup d’îles, la gestion et exécution des projets de traitement d’eau, la maintenance des infrastructures et le contrôle de la qualité de l’eau distribuée sont donc rendus plus difficile encore par cet isolement. Nous constatons de fait des grandes disparités dans le volume d’eau consommée des différentes îles et dans le prix de cette eau suivant la ressource utilisée, l’éloignement de l’île et le moyen de distribution envisagé.

 

Commune d’Arutua (île basse coralienne, atoll)

 

Commune de Fakarava (île basse coralienne, atoll)

 

Commune des Gambier

 

2 – Une ressource en eau insuffisante et sous tension

Mais la réelle contrainte, exacerbée par l’isolement, est bien avant tout le stress hydrique : le manque d’eau douce. En effet si la ressource n’est pas distribuée également dans tout l’archipel, la grande majorité des îles dépendent quasi exclusivement de l’eau de pluie pour leur approvisionnement en eau. Les îles atolls plates disposent de très peu de ressources en eau douce sous-terraine et d’aucune eau de surface**. La rare nappe d’eau douce présente dans certaines îles en quantité plus ou moins abondantes (la lentille d’eau douce) est quoiqu’il arrive une ressource très fragile, difficilement modélisable par les hydrogéologues (qui disposent par ailleurs de peu de données sur ces écosystèmes) et vulnérable au changement climatique et à l’activité humaine. En effet la montée du niveau de la mer accentue la pression extérieure sur ces nappes alors que le pompage dans ces nappes diminue la pression interne ce qui fait progresser le biseau salé, l’intrusion d’eau de mer dans les nappes. A termes ces lentilles d’eau douce peuvent se retrouver saumâtre et inutilisable.

 

Schéma des dynamiques hydrauliques sur les îles atolls

 

Ainsi les atolls dépendent de l’eau de pluie en grande majorité, pour la boisson et la cuisine, et parfois de l’eau sous-terraine (douce ou saumâtre) quand celle-ci est disponible pour la douche et les toilettes. La pluviométrie influe donc fortement sur cette ressource en eau et si les études et données scientifiques sont peu disponibles, le constat empirique est une baisse de cette pluviométrie, notamment dans les Tuamotu de l’est déjà historiquement moins pluvieuses. Ces deux ressources sont étroitement liées car quand l’eau de pluie vient à manquer, l’eau sous-terraine est surexploitée et le biseau salé progresse, accentuant le stress hydrique.

Système de récupération individuelle de l’eau de pluie Arutua

 

Système de récupération individuelle de l’eau de pluie Makemo

 

L’archipel des Gambier fait figure d’exception de par sa configuration géographique. Seules îles hautes des Tuamotu, l’archipel des Gambier capte plus facilement les nuages et les pluies de par son altitude et les stocke en sous-sol. Mais même au Gambier cette ressource est aujourd’hui fragilisée par la baisse de la pluviométrie et la salinisation des nappes. Et les ressources disponibles étant à comparer avec les consommations, l’archipel des Gambier lui aussi manque aujourd’hui d’eau douce.

** lacs, rivières

 

Puit d’eau salé et asséché Fakarava

 

3 – Des moyens de distributions et habitudes de consomation hétérogènes selon les contextes

3.1 La prévalence des bornes fontaines dans les atolls

Ces facteurs d’isolement et de pressions sur la ressource disponible sont en effet fortement liés à la consommation, aux usages et au mode de distribution de cette eau. Dans la très grande majorité des îles il n’y a pas de réseau d’eau. Il est en effet compliqué dans les atolls sans relief de poser et d’entretenir des canalisations sous-terraine à un niveau si proche de la mer pour des villages très dispersés. Par ailleurs l’absence de relief implique un système de distribution par surpression (ou surélévation artificielle des réservoirs) et non par gravité***; moyen de distribution le plus simple et le plus économique. La plupart des communes pour des raisons techniques, économiques et d’habitudes de consommation n’ont donc pas privilégié une approche de distribution de l’eau par réseau.

***l’eau utilise la pression naturelle de la pente pour s’acheminer dans les foyers

L’eau en bouteille (encore largement utilisée pour la boisson) est importée et vendu dans les magasins. Face à cette eau en bouteille plastique, extrêmement chère et polluante, les communes ont développé ces dernières années des distributions d’eau potable par bornes fontaines localisées dans le village. Ces systèmes récupèrent l’eau de pluie des bâtiments publics (écoles, mairie, gymnase…) la traitent par filtration et ultraviolet et la vendent le plus souvent en bornes fontaines automatiques à des tarifs plus de 10 fois inférieurs à l’eau en bouteille.  Cette gestion communale des bornes fontaines varient fortement suivant la politique de la commune, l’isolement de l’île, son niveau de développement et surtout les habitudes de consommation des usagers (confiance dans le système de traitement, capacité à payer, éloignement physique d’une borne…). En complément de cette eau potable (environ 5 L par jour et par personne), chaque foyer dispose d’un système individuel de récupération de l’eau de pluie sur son toit. Cette eau non traitée est stockée plus ou moins longtemps dans des cuves et vient compléter l’approvisionnent en eau des foyers pour les usages non potables et sanitaires. Enfin l’eau sous-terraine, quand disponible, est parfois utilisée pour compléter l’eau de pluie, notamment pendant la saison sèche. Les puits manuels et forages mécaniques sont exploités individuellement ou par la commune qui la distribue par camion dans la citerne des habitants en cas de sécheresse. Il est plus difficile d’évaluer la consommation journalière d’eau non potable dans les îles car chaque île et chaque foyer diffère y compris suivant la saisonnalité. Mais le volume de consommation est évalué entre 20 et 50 litres par jour et par personne soit une quantité 3 à 7 fois inférieure à celle utilisée en moyenne en Europe.

 

Système de traitement communal de l’eau de pluie Rangiroa

 

Borne fontaine communal Rangiroa

 

3.2 Les quelques exceptions de distribution par réseau

Deux îles, l’atoll de Hao dans les Tuamotu du centre et l’île de Mangareva au Gambier, font figure d’exception dans ce mode de distribution pour des raisons distinctes : la première historique, la deuxième géographique.

De 1966 à 1996, l’île de Hao constitue la base avancée du Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP) pour les essais nucléaires français. Peuplée de 190 habitants dans les années 60, l’île abritait au plus fort de l’expérimentation plus de 3000 habitants. Hao, chef-lieu d’une commune de 12 atolls, porte aujourd’hui encore les vestiges de cette base abandonnée qui bénéficiait à l’époque d’un réseau d’eau reliant et alimentant chaque habitation. La présence d’un réseau et le nombre croissants d’habitants de l’île allant de pair avec une hausse de la consommation, les ressources historiques d’eau de pluie et d’eau saumâtre ne suffisaient plus à alimenter l’île qui s’est tournée vers le dessalement. Si le réseau n’a pas survécu au départ du CEP, la commune et les habitants se sont adaptés pour répondre à la demande : bornes fontaines communales, distribution d’eau en camion, dessalement, récolte de l’eau de pluie et pompage de l’eau saumâtre, voici les principales ressources de l’île.

Vestige du réseau d’eau de Hao (île basse coralienne, atoll)

 

Au Gambier, l’île principale, Mangareva, peuplée de 1 400 habitants, a la particularité d’avoir un réseau d’eau en exploitation par les services communaux, qui alimente directement les habitants du chef-lieu Rikitea et des principaux villages alentours. L’eau du réseau vient principalement de la nappe phréatique et dans une moindre mesure du captage des eaux de sources des montages lorsqu’il pleut.  L’eau est distribuée via des réservoirs en hauteur et utilise la gravité pour alimenter les foyers. Mais face à la baisse de la pluviométrie et la progression du biseau salé, la salinité de l’eau du réseau ne cesse d’augmenter ces dernières années, abimant réseaux, vannes, tuyauterie et appareil électroménager…  La salinité empêchant l’usage de l’eau du réseau pour la consommation humaine et l’irrigation.

 

Forage de la commune des Gambier

 

Réservoir de stockage de la commune des Gambier

 

3.3 L’eau pour l’’irrigation, intrant limitant du développement des îles

Un autre usage de l’eau non mentionné et pourtant vital est l’agriculture. Fortement consommateur d’eau ce secteur permet cependant non seulement d’assurer des produits locaux de qualité aux habitants en substitut des produits importés mais également de créer une activité économique pour les pomutus, habitants des Tuamotu. L’utilisation de l’eau pour l’agriculture est en termes de priorisation des usages, possible uniquement lorsque les besoins de la consommation humaine sont satisfaits. Là encore donc seules les îles les mieux dotées en ressource sous-terraine peuvent se permettre de développer cette activité économique.

L’atoll de Tikehau par exemple, à la différence de la majorité de ses voisines est un atoll légèrement surélevé (10 mètres au-dessus du niveau de la mer) et offre en conséquence des ressources sous-terraine en eau douce plus abondantes. Cette ressource dans la partie de l’île la plus large permet, via des forages indépendants peu profonds, de développer une petite agriculture vivrière (raisin, maraichage, citron, papaye, banane, manioc…) développée par la direction de l’Agriculture de Polynésie Française.

 

Forage de la Direction de l’Agriculture de Polynésie Française à Tikehau

 

Serre de la Direction de l’Agriculture de Polynésie Française à Tikehau

 

Sur l’île touristique de Rangiroa, des agriculteurs et vignerons ont même développé grâce à la lentille d’eau douce sous-terraine une production de raisin et de canne à sucre produisant un excellent vin et rhum devenant ainsi le seul atoll au monde à produire cette liqueur.

L’eau est indispensable à la survie humaine mais plus largement à sa santé et à son développement économique.  Ressource plus que précieuse dans les Tuamotu, sa production, sa distribution et son usage varient fortement suivant la géologie de l’île, son isolement, son développement économique et les habitudes sociales.

Maraichage communal, Mangareva, Commune des Gambier

 

Des problématiques complexes et variées nécessitant des approches sur mesure adaptées aux cultures et au contextes

La problématique d’accès à l’eau dans les Tuamotu-Gambier, dans l’ensemble de la Polynésie française et plus globalement dans les îles du Pacifique est vaste, complexe et hétérogène. Si quelques constantes se dégagent (baisse de la pluviométrie, salinisation des nappes, isolement économique et géographique…), des approches spécifiques à chaque contexte doivent être envisagées et chaque projet est unique et doit s’adapter au contexte géographique, géologique, climatique, économique, social et culturel afin d’être pleinement adapté au besoin et surtout pérennisé dans le temps. Comme souvent une solution unique n’existe pas mais des solutions multiples technologiques et humaines permettront, nous l’espérons et le croyons, dans ces îles reculées et parfois oubliées, de fournir un accès durable à cette ressource essentielle qu’est l’eau.

 

Fermes perlières Arutua

 

C’est localement avec les maires, communes et habitants et à Tahiti avec les bureaux d’étude, experts de l’eau et institutions polynésiennes et françaises, que nous étudions les solutions les plus adaptées à chaque contexte. Optimisation de la récupération de l’eau de pluie, développement des filières de traitement, prélèvement raisonné des lentilles sous-terraine, semblent être les mesures les plus efficaces et largement adoptées. Lorsque malgré ces mesures, l’eau vient encore à manquer, l’océan offre en complément une source d’eau illimitée. Mais le développement du dessalement ne pourra être durable que s’il est autonome, solaire, écologique et adapté au contexte et problématique insulaire.

L’accès à l’eau en Polynésie

Un mois et demi que nous sommes arrivés en Polynésie et une semaine après notre grand départ pour les Tuamotu et notre tour du Pacifique, nous partageons avec vous le journal de bord de nos découvertes et activités.

Malgré une saison des pluies bien arrosée, la problématique d’accès à l’eau reste une des principales préoccupations de beaucoup de communes polynésiennes. L’archipel des Tuamotu notamment, composé d’îles atolls (île basse coralienne) est particulièrement touché par le manque d’eau du fait de la faible pluviométrie (dû à l’absence de relief qui capte les nuages sur les îles hautes, et au changement climatique), de l’absence de ressource en eau de surface (lac, rivière) et de la vulnérabilité de la lentille d’eau douce (eau sous-terraine de plus en plus salée du fait de la montée du niveau de la mer).

L’eau dans ces atolls vient de plusieurs sources :

  • De la récupération de l’eau de pluie de manière individuelle via les toits des maisons et des cuves plastiques. L’eau non traitée et parfois longuement stockée n’est pas toujours propre à la consommation
  • De la récupération de l’eau de pluie via les services de la commune (toits communaux et cuves plastique, eau traitée par filtration et chloration) qui vend l’eau via des bornes fontaines
  • Parfois de l’eau saumâtre sous-terraine (impropre à la consommation)
  • De l’eau en bouteille importé (excessivement chère et polluante)

Nos constatations

Si en saison des pluies, les cuves permettent souvent de faire le plein, les particuliers et pensions de famille vivent sur leur réserve en saison sèche avec la peur constante de manquer d’eau.

Aujourd’hui, même certaines îles hautes de Polynésie (îles Marquises, Maupiti, Moorea…) ne sont pas épargnées par le manque d’eau, lors des saisons sèches.

Comme en métropole, la compétence eau est communale et les petites communes isolées sont parfois démunies face à ces problématiques. Elles se regroupent alors en syndicat de commune et se dotent de moyen humain et technique pour gérer les projets financés souvent par le gouvernement.

Ces premières semaines en Polynésie nous ont permis de mieux saisir les enjeux polynésiens et contextes locaux, de rencontrer les syndicats de communes, représentants du gouvernements, bureaux d’étude et partenaires techniques.

La priorité du solaire et l’importance de la formation

Nous pensons que dans certaines communes en stress hydrique, le dessalement peut apporter une solution complémentaire à l’eau de pluie. Mais ce service de dessalement ne sera durable et pertinent que s’il est solaire, au vu du coût local de l’électricité et de la complexité de l’approvisionnement en diesel, écologique (avec des techniques douces de captage et de rejet), simple et robuste.

Si l’aspect technologique est important, la réussite des projets vient surtout de la capacité à développer et fournir une compétence et un service local. Cela passera par les formations des équipes techniques communales et la présence à Tahiti d’un service d’appui à l’opération et la maintenance (c’est ce sur quoi nous travaillons avec notre partenaire local Océa). Une technologie sans service, surtout dans les îles isolées, ne pourra pas être durable ! En utilisant le solaire comme source principale d’énergie, avec des équipements simples et robustes et des équipes formées dans les communes et à Tahiti, le coût d’opération de ces systèmes est quasi nul et bien inférieur aux prix des bornes fontaines et plus encore au prix de l’eau en bouteille.

Mais surtout pour construire un projet et un service adapté et durable, il apparait clair qu’il faut impliquer dès le début les acteurs locaux et les communes et communautés dans la conception du projet pour faire émerger des solutions en adéquation avec l’écosystème local, les contraintes logistiques, l’environnement, la culture locale…

Au lendemain de notre départ pour les Tuamotu nous sommes impatients d’aller à la rencontre des communes, communautés et acteurs de l’eau des Tuamotu, Gambier et Australes, pour comprendre les problématiques et enjeux locaux et travailler ensemble sur des solutions locales et durables.

Le bateau est prêt et l’avitaillement fini. L’aventure commence !

Visite des locaux de Mascara à Chartres de la commune polyésienne des Gambier

La commune des Gambier dans l’archipel des Tuamotu-Gambier en Polynésie Française souffre de plus en plus du manque d’eau liée à la baisse de la pluviométrie et la montée du niveau de la mer, salinisant les nappes. Suite à la visite de Mascara aux Gambier en 2021, la délégation de la commune des Gambier s’est rendue dans les locaux de Mascara à Chartres fin 2022 pour étudier la faisabilité du projet de dessalement solaire OSMOSUN® pour sécuriser l’accès à l’eau potable de l’île.

Les discussions fructueuses ont permis de mieux comprendre les besoins et enjeux de la commune et de discuter des solutions les plus adaptées pour répondre au besoin de l’archipel.

L’équipage de la Kori Odyssey se rendra début 2023 en voilier dans la commune des Gambier afin d’avancer dans l’instruction du projet dont la faisabilité sera validée par le schéma directeur en cours sur l’île.

Video de la presse locale sur la visite de Mascara au Gambier :

https://www.tntv.pf/tntvnews/polynesie/environnement/les-gambier-se-tournent-vers-le-soleil-pour-leau-potable/

Lancement de Kori Odyssey à l’occasion de la Pacific Water Conference à Fiji

A l’occasion de sa participation à la « Pacific Water and Wastewater Conference » en novembre 2022 à Fiji, Mascara NT entreprise française spécialisée dans les solutions innovantes de traitement de l’eau avec l’utilisation d’énergies renouvelables, lance son programme Pacifique Kori Odyssey, visant à rencontrer l’ensemble des acteurs de l’eau du Pacifique pour mettre à l’échelle les solutions décarbonées de traitement d’eau pour les communautés isolées de la région.

Cet événement majeur du secteur de l’eau dans la région réunit les gouvernements, compagnies d’eau, bailleurs, opérateurs, bureaux d’études et a permis aux équipes de la Kori Odyssey de faire connaitre l’initiative et de programmer les rencontres et visites de l’année prochaine !

Merci à la Pacific Water Association pour l’organisation de cet événement !

Mise en œuvre du premier programme d’accès à l’eau potable des communautés isolées du Vanuatu via la technologie de dessalement solaire OSMOSUN®

Les équipes de Mascara Nouvelles Technologies se sont rendus au Vanuatu en septembre 2022 pour lancer le programme d’accès à l’eau OSMOSUN dans les îles reculées du pays et rencontrer le acteurs locaux et nationaux du programme.

Sécuriser l’accès à l’eau potable avec une solution de dessalement bas carbone

Situé entre la Nouvelle Calédonie et les Fidji, le Vanuatu est composé de pas moins de 83 îles avec de très nombreux villages. Les plus petites îles peuvent être confrontées à des problèmes d’accès à l’eau potable. Cette dernière est – la plupart du temps – obtenue en collectant l’eau de pluie ou via des forages, mais ces solutions ne couvrent pas toujours les besoins aussi bien en qualité, qu’en quantité. C’est pourquoi il est nécessaire de compléter les installations existantes avec des systèmes de dessalement, telles les unités de type OSMOSUN® de Mascara NT, qui – alimentées par l’énergie solaire – sont autonomes, bas carbone et aux impacts limités sur l’environnement.

Dans le cadre de ce programme, 8 unités OSMOSUN® vont être installées dans 6 villages isolés. Deux unités auront la particularité d’être mobiles et seront destinées aux situations d’urgence. Ces unités de dessalement vont permettre d’approvisionner en eau potable les villages mais aussi et surtout de renforcer les capacités et la résilience du DoWR, l’agence nationale de gestion de l’eau, notamment via ces deux unités de dessalement solaire mobiles mobilisables en cas de crise.

Les unités OSMOSUN® devraient être livrées et installées courant 2023.

Le programme Vanuatu bénéficie d’un financement de la Direction générale du Trésor, dans le cadre d’un appel d’offre (FASEP) consacré à la décarbonisation de services essentiels lancé en 2021. A l’issue du programme, DoWR – l’agence de l’eau locale qui est partenaire -, deviendra propriétaire et opérateur du projet.

L’ingénierie sociale, clé de la pérennisation de l’accès à l’eau

Véritable reflet de la philosophie et de la vision de Mascara NT, le projet Vanuatu ne se limite pas à la seule installation d’unités de dessalement. Chaque cas fait l’objet d’une étude préalable et Mascara NT veille à déployer le meilleur cadre opérationnel pour chaque situation afin qu’une fois le matériel livré, les opérateurs locaux (agences de l’eau, municipalités) s’approprient l’unité et en assurent la maintenance. En marge de chaque projet, Mascara NT assure des formations, et fournit les pièces si nécessaire.

Programme pilote, le programme Vanuatu se veut exemplaire et a vocation à se développer à moyen terme sur toutes les îles du Pacifique, via la Kori Odyssey.

« Nous sommes très fiers de lancer ce programme sur la zone Pacifique », explique Quentin Ragetly CEO de Mascara NT. « C’est une occasion unique pour Mascara NT de montrer l’intégralité de son savoir-faire, installer des unités de dessalement bas carbone mais aussi écouter les besoins de toutes les parties prenantes – ministères de l’eau, gouvernements, opérateurs et usagers – pour travailler et trouver ensemble des solutions durables pour sécuriser l’accès à l’eau potable. C’est notre proposition de valeur et aussi et surtout notre vision et notre volonté. »